La pieuvre
Victor Hugo (Besançon, 1802- Paris, 1885)
Fortuné Louis Méaulle (1844 – 1901), graveur
Imprimerie P. Mouillot, imprimeur
Ateliers de reproductions artistiques, éditeur
Dessins de Victor Hugo. Les Travailleurs de la mer, 1882
Estampe
Inv. 1958.32.1.48 [164]
« Pour croire à la pieuvre, il faut l’avoir vue.
Comparées à la pieuvre, les vieilles hydres font sourire.
(…) Tous les idéals étant admis, si l’épouvante est un but, la pieuvre est un chef-d’œuvre. (…) La pieuvre n’a pas de masse musculaire, pas de cri menaçant, pas de cuirasse, pas de corne, pas de dard, pas de pince, pas de queue prenante ou contondante, pas d’ailerons tranchants, pas d’ailerons onglés, pas d’épines, pas d’épée, pas de décharge électrique, pas de virus, pas de venin, pas de griffes, pas de bec, pas de dents. La pieuvre est de toutes les bêtes la plus formidablement armée.
Qu’est-ce donc que la pieuvre ? C’est la ventouse.
Dans les écueils de pleine mer, là où l’eau étale et cache toutes ses splendeurs, dans les creux de roches non visités, dans les caves inconnues où abondent les végétations, les crustacés et les coquillages, sous les profonds portails de l’océan, le nageur qui s’y hasarde, entraîné par la beauté du lieu, court le risque d’une rencontre. Si vous faites cette rencontre, ne soyez pas curieux, évadez-vous. On entre ébloui, on sort terrifié. »
Les Travailleurs de la mer, II, 4, 2